Très peu connu en France, Lucas Sithole est pourtant une des figures sportives emblématiques d’Afrique du Sud. Il est né dans le Kwa-Zulu Nata, une province côtière entourée de montagnes et de savane, et son histoire incroyable est ponctuée de tragédies et d’intenses moments de joie. Découverte de cet homme résilient.
D'une vie à l'autre
Lucas Sithole vit une enfance paisible et fréquente l’école publique de Siphuthando à Emafusini. Pour passer le temps, il arpente les rues de Dannhauser et, de temps en temps, aide un conducteur de train en réalisant des travaux manuels. Jusqu’au jour où sa vie bascule. Alors qu’il change les lignes du chemin de fer, il tombe sous les rails d’un train en mouvement. Il a douze ans et vient de perdre, pour le restant de ses jours, ses deux jambes et une partie de son bras droit.
Le jeune garçon qui aimait courir dans les rues de son canton n’a plus goût à la vie. Mais l’inscription dans une école pour enfants handicapés lui ouvre de nouvelles perspectives. Il entre alors dans une phase d’acceptation et de résilience. Et quelques années plus tard, il va découvrir le tennis en fauteuil.
Le tennis comme remède
Sept ans après son accident, le Sud-Africain débute et apprend le tennis tout seul. Nous sommes alors en 2005, et personne ne peut se douter à l’époque que huit années plus tard il remportera l’US Open. En apprenant tout seul, il se prouve à lui-même qu’il peut vivre une vie normale. « Si tu regardes Lucas physiquement, tu penses à toutes sortes de raisons pour lesquelles il aurait du mal à faire des choses, mais quand tu le connais, tu vois qu’il relève des défis, il vit sa vie au maximum » confie un de ses proches. Ses débuts professionnels commencent en 2006, il affronte David Wagner et perd le match 6/0 6/0.
Son profil de jeu ? Il frappe fort avec beaucoup de lift en coup droit et en revers. Très rapide sur le court, il a de bons déplacements avec le fauteuil et de bons coups malgré tous ses handicaps. Si ces qualités indéniables lui permettent de progresser rapidement et de se hisser au classement ITF, sa vraie force réside dans sa détermination et son mental. Le travail paye puisqu’en 2011 il remporte le British Open, son premier Super Series et devient, en 2013, n°2 mondial de sa catégorie (Quad). Cette année-là, il réussit le plus grand exploit de sa carrière de tennisman en remportant l’US Open, en battant David Wagner. « Il s’est exceptionnellement bien débrouillé pour arriver là où il se trouve maintenant » témoigne alors son entraîneur. Cependant, Lucas Sithole est déterminé à encore progresser et réaliser ses rêves : devenir n°1 mondial et remporter la médaille d’or aux jeux paralympiques. « J’ai beaucoup appris cette année, j’ai acquis plus d’expérience et je retournerai chez moi pour continuer à travailler dur » affirme-t-il fin 2017.
Une star et un modèle en Afrique du Sud
Il est le1er sud-africain à gagner l’US Open, l’un des 4 Grands Chelems, et tous ses compatriotes le découvrent. Le joueur reçoit énormément de soutien et de messages de félicitations, notamment du Président de l’Afrique du Sud, Jacob Zuma, « ce n’est pas un mince exploit, vous avez rendu le peuple et le gouvernement sud-africain extrêmement fier » . Si les hautes instances sont sensibles à son exploit, le plus grand soutien vient de la population. A son retour des Etats-Unis, Sithole est accueilli par une grande foule à l’aéroport. Le joueur est devenu une star et un modèle à suivre dans son pays, qui regorge de champions paralympiques. Après les années Pistorius et Nathalie du Toit, deux joueurs handicapés qui ont concouru chez les valides, l’Afrique du Sud a trouvé en Lucas Sithole son porte-drapeau pour promouvoir le tennis fauteuil.